La nature est parfois surprenante. Saviez-vous que l’amadouvier était un champignon permettant de faire du feu ?
L’amadouvier (Fomes fomentarius) a été cueilli et utilisé dès les temps préhistoriques pour faire du feu. Il s’agit d’un champignon xylophage (parfois parasite) du groupe des pourritures blanches. Son chapeau coriace, en forme de sabot de cheval, mesure quelques dizaines de centimètres et forme une excroissance sur les troncs de hêtres, de platanes, de chênes ou de peupliers morts ou affaiblis. La chair située immédiatement sous la croûte dure du chapeau est combustible; de consistance ouatinée et cotonneuse, excoriée en flocons de bourre, elle est utilisée pour fabriquer l’amadou. La présence de ces chapeaux sur un tronc d’arbre n’est pas bon signe pour le forestier. Ils signifient que le mycélium invisible de l’amadouvier a largement colonisé le bois de sa victime. Le dépérissement, la mort et la chute de l’arbre ne mettent pas un terme au développement de l’amadouvier qui, devenu saprophyte, poursuit son œuvre jusqu’à la destruction totale du bois.
À l’époque préhistorique, les hommes allumaient le feu grâce à des étincelles produites par la percussion d’un morceau de bisulfure de fer marcassite ou pyrite contre un silex. Pour piéger l’étincelle, il fallait utiliser une matière capable de s’embraser rapidement. L’amadou, chair de l’amadouvier, comptait parmi les matières les plus efficaces dans la trousse à outils de nos ancêtres. Ötzi, cet homme de l’âge du cuivre vivant il y a quatre mille cinq cents ans, retrouvé momifié dans le glacier du Hauslabjoch à la frontière austro-italienne en 1991, portait sur lui des polypores du bouleau (Piptoporus betulinus) enfilés sur une lanière de cuir – un vermifuge intestinal lui permettant de lutter contre la trichine qui le parasitait – et un petit sac comprenant un nécessaire à feu (amadou, silex, fragments de pyrite). Dans la Chine des empereurs, l’amadou était employé pour allumer la poudre des feux d’artifice et des arquebuses. Après broyage, on ajoutait du salpêtre (nitrate de potassium) et du chlorate de potassium. Il suffisait alors de générer une étincelle en percutant un silex contre une marcassite ou de la pyrite pour ranimer le feu couvant.
Progressivement, les percuteurs en acier vont remplacer la pyrite du briquet à silex. Le briquet à silex a perduré en France jusqu’en 1914, avec des artisans « amadoueurs » en Gironde ainsi qu’à Niaux, dans l’Ariège. Cependant, les principaux centres de fabrication se trouvaient en Allemagne, en particulier dans la Forêt-Noire. L’amadou avait bien d’autres utilisations, entre autres médicinales (cautérisation, pansement, usage hémostatique, etc.) et vestimentaires (aujourd’hui encore en Roumanie).
Une réflexion au sujet de « Peut-on faire du feu avec un champignon ? »