Les champignons sont des organismes hétérotrophes, c’est-à-dire qu’ils obtiennent l’énergie et le carbone aux dépens de matières organiques préexistantes. Par définition, les champignons sont dépourvus de chlorophylle et sont incapables d’effectuer la photosynthèse. Trois principaux modes de vie existent chez les champignons.
(1) Le saprophytisme, une forme de vie primitive, s’avère la forme la plus fréquente chez les champignons. Le champignon blanc, ou de couche, et le pleurote en sont deux exemples. Les saprophytes se contentent de trouver leur carbone et leur énergie dans la matière organique morte d’origine animale, végétale, fongique ou même microbienne. Ces champignons plongent leurs mycéliums dans le substrat ou, en compagnie de la flore microbienne et de la microfaune, ils décomposent les structures animales et végétales mortes pour en extraire leur nourriture et assurer ainsi le recyclage des éléments minéraux.
(2) Le parasitisme constitue une forme de vie plus évoluée et plus spécialisée, par exemple, la carie des arbres et la rouille du blé. Les champignons parasites pénètrent les structures des plantes et des animaux vivants pour y puiser une partie ou la totalité du carbone et de l’énergie dont ils ont besoin. Certains ne causent que des dommages bénins a leurs hôtes, tels que des taches foliaires, alors que d’autres peuvent les tuer, comme c’est le cas de la brûlure du châtaignier et de la maladie hollandaise de l’orme causées par deux champignons venus d’Europe qui ont pratiquement éliminé leurs hôtes en Amérique du Nord. Les champignons parasites causant des maladies et même la mort de leurs hôtes se sont diversifiés et spécialisés au cours de l’évolution, mais ils ne sont pas parvenus à s’imposer de façon généralisée, a la manière des champignons mycorhiziens symbiotiques. Nous les avons qualifiés de symbiotes manqués.
(3) La symbiose constitue la forme de vie la plus évoluée par laquelle les champignons obtiennent une partie plus ou moins importante de leur carbone et de leur énergie, a partir d’un hôte sans lui causer quelque dommage que ce soit, bien au contraire. On y retrouve une grande proportion des champignons forestiers comestibles, dont la chanterelle, le cèpe, les truffes, ainsi que de redoutables amanites.
Structures reproductrices de quelques espèces comestibles
En forêt, on trouve quelques espèces de champignons comestibles saprophytes ne formant pas de mycorhizes. Toutefois, la majorité des espèces recherchées et récoltées vivent en symbiose avec des arbres.
Voici quelques exemples d’espèces ectomycorhiziennes comestibles qui, a l’exception de la morille, ont absolument besoin d’être associées à un arbre pour survivre et produire leurs fructifications.
Le pied de mouton constitue un exemple de champignon qu’on aime toujours retrouver en forêt.
© Marie-France Gévry, UQAR
Le cèpe est une autre espèce intéressante. Il s’agit d’un champignon très élégant qui peut atteindre des dimensions considérables, mais qu’il est préférable de cueillir en bouton (bouchon) avant qu’il ne soit envahi par les larves d’insectes. Sa durée de vie demeure relativement courte, moins d’une semaine.
© Marie-France Gévry, UQAR
La chanterelle, ou girolle, a toutes les qualités espérées. La découverte d’une colonie de chanterelles entraîne toujours l’émerveillement, année après année, à cause de sa forme agréable et de sa belle couleur. De plus, son parfum unique au monde permet de l’identifier les yeux fermés. Contrairement à la majorité des espèces dont la durée de vie est éphémère, la durée moyenne d’une fructification de girolle est d’environ 45 jours et peut même atteindre 60 jours, sous des conditions les plus favorables. On y observe relativement peu de larves d’insectes. Des chercheurs polonais ont réussi à tuer des blattes avec des extraits de chanterelle. Quelle est donc la nature de cet insecticide biologique ? C’est un champignon qui se conserve bien à l’état frais et se prête bien au transport. Comme si ce n’était pas suffisant, la chanterelle possède une qualité ultime : la fidélité. En effet, lorsqu’on trouve des chanterelles a un endroit précis une année, on peut être certain d’en voir encore chaque année exactement au même endroit, si les conditions climatiques sont favorables.
© Marie-France Gévry, UQAR
Le bolet orangé aux coloris extraordinaires attire facilement l’attention. Le matsutaké, particulièrement apprécié dans les pays d’Asie et de plus en plus dans le monde, possède un parfum puissant. Il s’agit d’une espèce essentiellement associée aux pins, et qui se développe en saison froide. On constate maintenant que le vocable de matsutaké recouvre plusieurs espèces d’intérêt gastronomique varié.
© Marie-France Gévry, UQAR
La morille, un champignon printanier passablement difficile à trouver, nécessite de longues périodes de recherche avant d’en découvrir les colonies. Dans les forêts boréales d’Amérique du Nord, on trouve deux types de morille, un premier associé aux forêts feuillues (peupliers, cerisiers de Pennsylvanie, etc.), le plus souvent sur des sols sablonneux, et un deuxième type qui s’associe aux grandes forêts conifériennes (pins, épinettes). Dans ce dernier cas, les fructifications n’apparaissent que l’année suivant un incendie de forêt. Il arrive que de grandes surfaces soient brûlées certaines années et qu’on puisse cueillir ces morilles par dizaines de tonnes l’année suivante. La morille est-elle mycorhizienne ? Oui et non. Bien qu’elle soit capable de former des ectomycorhizes, elle peut fort bien se développer et fructifier en l’absence de toute relation mycorhizienne. Il semble bien que la morille préexiste sous forme végétative en profondeur des sols forestiers, l’arrivée du feu permettant leur fructification. Il s’agit d’un champignon rhizonécrophage, si on nous permet ce néologisme.
© Renée Dumouchel, FauneNord
Visuel haut de page : Cèpe d’Amérique © Herman Lambert
Source : Les mycorhizes, l’essor de la nouvelle révolution verte de J. André Fortin, Christian Plenchette et Yves Piché, paru aux éditions Quæ