Pour produire en agriculture tout en respectant au mieux l’environnement dans toutes ses composantes (préservation de la qualité de l’eau et de l’air, des ressources naturelles, de la biodiversité et des paysages), il faudrait revenir à des systèmes combinant les trois grands types de production que sont les cultures annuelles, les cultures pérennes (prairies permanentes, arbres, arbustes) et l’élevage (ruminants et monogastriques).
En effet, cette combinaison valorise mieux les ressources du milieu lorsque l’équilibre est judicieusement réfléchi, et le système gagne en autonomie et en durabilité. De nombreuses synergies et complémentarités existent parce que les sous-produits d’un maillon peuvent devenir intrants ou cofacteurs de production pour un autre. Cette approche pourrait être contradictoire avec la diminution de consommation de viande prônée par certains. Concrètement, avoir une meilleure répartition de l’élevage sur le territoire aurait d’énormes avantages pour la ferme France.
La situation actuelle qui concentre l’élevage dans quelques zones, et en particulier en Bretagne, conduit à un énorme gaspillage de fertilisants. Inversement, dans les zones de grandes cultures, la fertilisation est assurée par des engrais minéraux (qui sont aujourd’hui dans leur totalité issus de produits importés) dont la fabrication est extrêmement coûteuse en énergie. Dans les régions d’élevage, il faut corriger à grands frais les effets des excédents d’azote et de phosphore (traitement des eaux, transport à longue distance de fumier ou de lisier, etc.), ce qui se traduit aussi par des coûts en énergie importants. L’association polyculture-élevage sur une large partie du territoire permettrait de valoriser plus de légumineuses, et d’une part de diminuer les importations de soja et d’autre part de diminuer les besoins en engrais azoté et phosphaté.
En ce sens, une meilleure répartition de l’élevage sur le territoire français permettrait vraisemblablement de diviser par deux la facture énergétique de l’agriculture française. Par ailleurs, l’introduction de cultures fourragères dans les rotations céréalières permet d’allonger les rotations et ainsi de diminuer la pression des bioagresseurs tout en améliorant les teneurs en matière organique. Cette stratégie aurait donc aussi l’avantage de diminuer fortement les besoins en produits phytosanitaires.
Le système AB en grande culture associée à l’élevage est souvent proche de ce modèle. Pour cette raison, aujourd’hui, c’est le système qui est mis en avant par les mouvements écologistes. Néanmoins, il est rappelé dans cet ouvrage qu’en production végétale les rendements en AB sont inférieurs à ceux de l’AC, même quand on est dans des systèmes de polyculture-élevage. Pour améliorer la situation, il serait possible d’imaginer des systèmes de production végétale autorisant un recours très limité aux produits phytosanitaires (contre certains insectes pour lesquels il n’y a pas de solutions alternatives de lutte, ou certains champignons etc …)
On se trouverait dans ce cas dans la situation de l’élevage où quelques traitements allopathiques sont autorisés dans le cahier des charges AB.